Une collaboration de plus avec Romain Winkler, quel en est le contexte cette fois-ci?
ALIX : Avec Romain, on avait tous les deux des envies plastiques, bubble, colorées, des envies de danse, de clip "100% clip", quelque chose qui soit immersif et total. Finalement on s’est partagé les rôles, la direction artistique d'un coté pour moi et la réalisation de l'autre pour lui. Les frontières sont poreuses entre ces deux postes dans ce type de projet très visuel. Le choix d'utiliser des facekinis ou
d’inviter l’artiste contemporaine Luna Rustha à apparaitre en"femme armée" par exemple avait des incidences sur l'écriture.
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Un sentiment permanent d'overdose d'informations.
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ROMAIN : Il y avait aussi l'idée de boucler une trilogie (Rien, Vilaine, Boubouche). Il arrive en dernier mais ce serait en fait le premier. La montée, l'excitation, l'explosion de couleurs, la jungle et les nymphes, sorte d’état de nature. La bave qui englue les trois odezenne comme un liquide amniotique, d'où ils naissent pour se retrouver dans un monde qui bave ses contradictions. Le triptyque est une manière de clarifier mon intention. Sans pour autant parler des caméras subjectives, je voulais garder une caméra très vivante. Dans Rien, elle est agressive froide et collante. Dans Vilaine elle est ivre, elle voit double et a la tête qui tourne. Une fois lâchée dans la boubouche elle est curieuse et naïve, innocente mais un peu délurée. Bref une trilogie de caméras à forte personnalité.
Entre cette jungle, le studio, les trompe-l'oeil et certaines phases hallucinogènes, nous sommes plongés au cœur d’un univers ambigu. Est-ce voulu?
ROMAIN : Le décor, l'envers du décor, l'intérieur et l'extérieur, de même que la question de ce qu'on dévoile de l'intime... Tout cela est
central par rapport au morceau qui parle d'entrer dans une bouche, de pénétrer une intimité de manière un peu naïve et bégayante, dansante certes mais transgressive. Donc oui, ambigu !
ALIX : C’est vrai qu’on a tenté de digérer les grands thèmes d'actualité du moment, mêlés à un sentiment permanent d'overdose
de sur-information. On ne voulait pas d'un clip uniquement esthétique, gratuit. On voulait qu'il interpelle.
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On a décidé de s'amuser de l’actualité pour construire un univers pop. Les burkinis
sont devenus des facekinis, la jungle de Calais est devenue une vraie jungle et ainsi de suite…
Ce clip suit celui de "Chimpanzé", qui est beaucoup moins festif, plus militant. Y a t-il une raison à un tel contraste entre ces deux sorties?
ALIX : Je n'ai pas le sentiment d'un travail moins engagé... la vie ou la fête sous surveillance militaire, la maquilleuse kamikaze, la jungle avec ses migrants aux visages masqués, devenus presque des créatures inhumaines qu'on fait danser sur nos libertés en lambeaux. Les nymphes, nues, naïves et non concernées par ce qu'il se passe. Le questionnement sur l’existence de Dieu à travers la
mort des anges et les plumes qui planent sur le studio. C’est un mille-feuilles ce clip, faut le regarder à nouveau.
ROMAIN : C'est deux manières très différentes de parler du monde
d'aujourd'hui. Deux approches, celle du documentaire et celle de Boubouche, un rituel dansant pour se libérer un peu de tout le vomi médiatique ambiant et plus particulièrement celui de cet été. Et puis
il y a quand même un côté mélancolique dans le morceau. C'est la fête mais c'est la crise, on danse dessus.
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C’est un mille-feuilles ce clip,
faut le
regarder
1000 fois.
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Et derrière le mille-feuille, quel est le message?
ALIX : Oui, une impression qu'on aimerait laisser, une impression de liberté et d’incompréhension. C’est normal d'avoir envie de couleurs en ce moment, tout comme c’est normal de ne rien comprendre. Et puis Boubouche portait déjà cette ambiguïté entre titre dansant et titre dormant, désormais retranscrit à l’image entre
pop et punk, un happening funky.
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